Constitution d’un patrimoine commun dans l’interculturalité
Jacqueline Ursch, directrice des Archives départementales des Bouches-du-Rhône, a fait une présentation sur la constitution d’un patrimoine commun dans l’interculturalité. Elle travaille dans un département industriel et multiculturel, en mutation constante.
Le réseau « Histoires et Mémoires des Immigrations et Territoires » a été mis en place pour échanger, conserver, faire connaître, mutualiser et valoriser les réflexions et les productions issues de l’immigration.
Il est important de pouvoir restituer la mémoire dans une idée de don et de contre-don. La collecte de fonds d’association comme celui d’Ancrages, permet par la suite de les valoriser et de retransmettre leur action et leur rôle dans la vie locale.
Un partenariat pour la mémoire orale arménienne a été mis en place. Les arméniens représentent 10% de la population à Marseille. Des récits ont été enregistrés pour partager leurs histoires familiales. 150 heures d’archives sonores ont ainsi été collectées. Bien entendu, il fallu faire signer des contrats pour permettre la conservation et la diffusion. Ce projet permet de mettre en valeur l’identité de cette communauté.
La collecte du fonds de Jacques Windenberger a également été un projet important porté par Jacqueline Ursch. Il est constitué de plus de 400 000 photographies. Elles étaient déjà identifiées mais la remise aux normes, l’inventaire et le conditionnement a représenté un travail considérable d’autant plus que le photographe est toujours en activité. Son travail documente la vie quotidienne des marseillais pendant la seconde moitié du XXème siècle. Il a notamment travaillé sur la construction du complexe industrialo-portuaire de Fos-sur-Mer. Il a continué son œuvre dans les années 90 autour de la problématique de l’immigration à Marseille.
Le nouveau bâtiment des Archives départementales des Bouches-du-Rhône se trouve dans le quartier d’Arenc. Des actions de médiation ont été mises en place afin de rencontrer les voisins, notamment au niveau des lieux d’échanges que sont le parvis et le jardin. Ce sont des endroits où les gens viennent d’eux-mêmes.
D’autres actions de valorisation ont porté sur les travailleurs indochinois en France ou sur les harkis. Le but est toujours de mettre en avant le patrimoine commun dans l’interculturalité. Les archives sont un passeur d’histoire et des mémoires.
Les archives sont-elles des objets patrimoniaux ?
Bénédicte Grailles, maitresse de conférence en archivistique à l’université d’Angers a présenté ses réflexions à propos d’une expérience de recherche collective sur les nouveaux patrimoines en Pays-de-la-Loire. Un programme régional a été mis en place afin de structurer la recherche. Un groupe s’est concentré sur la thématique de la « patrimonialisation ». Cela a donné naissance au projet Néopat dont l’objet est d’étudier les patrimoines nouveaux qui ont émergés à partir des années 70.
Avant d’être considérées comme patrimoniales, les archives sont considérées comme sources. Dans la plupart des cas, seule leur valeur historiciste est prise en compte.
Le patrimoine ne se conserve pas naturellement. Du point de vue du droit, les archives sont bien un objet patrimonial comme les autres. Cependant, des mesures particulières sont souvent mises en place pour elles, ce qui les éloigne un peu des autres objets patrimoniaux. Comme tout élément du patrimoine public, elles sont inaliénables mais elles peuvent être soumises à des éliminations encadrées.
La question développée ici permet de s’interroger sur ce qui fait que les archives sont un objet patrimonial ou pas. Les processus à l’œuvre dans leur mise en patrimoine sont aussi étudiés.
Paul Pichon