Marques, patrimoines et contenus numériques
Le séminaire a eu lieu le jeudi 30 mai 2013 au 9bis, avenue Iéna au Salon des Arts et Métiers. Il portait sur les « Marques, patrimoines et contenus numériques ». La première partie du séminaire était une discussion dirigée par Marie-Anne Chabin. Le débat s’est principalement orienté vers la création d’un service patrimonial au sein des grandes entreprises, ainsi que l’impact de ce dernier sur les moyens de communication. La seconde partie fut centrée sur des études de cas : PSA Peugeot Citroën et les Galeries Lafayette.
Présentation
L’I.N.A a commencé à changer ses missions voilà maintenant quelques années. Depuis sa création il y a près de 40 ans (1975), sa mission principale est le dépôt légal. Cependant avec l’avènement du numérique, l’institution a mis en place des programmes d’aides pour les professionnels, et s’est également ouverte vers le public avec la création, en 2006, du site ina.fr. L’année dernière, l’I.N.A a mis en place une nouvelle division : Ina-expert. Cette dernière met en place des enseignements, organise des études afin d’apporter des conseils aux professionnels.
Suite à cette présentation de l’I.N.A., Serge Schick (dir. d’Ina-expert) et Clément Malherbe (rédacteur de l’étude) ont pris la parole pour présenter une étude d’Ina-expert sur « les dispositifs de valorisation des fonds audiovisuels des entreprises ». La synthèse de l’étude montre que les entreprises ont un engouement pour le patrimoine et l’histoire. Clément Malherbe a interrogé de nombreuses entreprises ainsi que les entités patrimoniales affiliées et les associations. Il apparait que les entreprises conservent les archives dans le but de mettre en place une valorisation par la suite. Cependant la valorisation pose généralement des problèmes de droit, en particulier pour la diffusion. L’intérêt pour les archives se décline en deux catégories :
les enjeux internes |
les enjeux externes |
Illustrer le savoir-faire | Légitimer et crédibiliser les marques |
Favoriser la création | Définir le positionnement |
Transmettre le geste | Se démarquer de la concurrence |
Renforcer l’appartenance | Fidéliser les consommateurs |
Fédérer les collaborateurs | Renforcer le lien avec le consommateur |
Rationaliser les processus de gestion de l’information et des médias | Limiter les coûts de production |
Dès qu’une entreprise met en place une entité patrimoniale, cela aboutit dans la plupart des cas à la création d’une bibliothèque multimédia en interne.
Le patrimoine audiovisuel au service de la stratégie des marques
Les débats de cette table ronde, modérés par Marie-Anne Chabin, furent menés par Marie-Laure Fourt (Directrice de la documentation images et production photo, Louis Vuiton), Arnaud Leblin (Directeur de la communication institutionnelle, Lacoste), Roger Nougaret (Responsable Archives et Histoire, groupe BNP Paribas) et Natalie Rastoin (Directrice Générale, Ogilvy France).
Marie-Laure Fourt a commencé la discussion en présentant son institution qui possède un fonds allant de 1880 à nos jours. Son service conserve près de 300 000 photographies, de l’argentique au numérique. L’ensemble des documents est géré à partir d’une base de données où tout est indexé. Elle est présente sur l’intranet et accessible aux 16 000 employés. Lors de la communication externe, les images reçoivent une watermark. La seconde intervention fût menée par Roger Nougaret qui a expliqué l’intérêt d’un service patrimonial au sein des banques, notamment en période de crise de légitimité. Arnaud Leblin a raconté la création récente, il y a à peine 5 ans, du service patrimonial Lacoste. Cette mise en place est due aux 75 ans de la marque et à la nécessité d’un service travaillant sur l’historique de l’entreprise. Il a rappelé le rôle fédérateur de l’histoire au sein d’une marque : pour preuve, chaque année il organise un concours entre les collaborateurs. Le gagnant est celui qui trouve une archive inédite en rapport avec la marque, par exemple la présence de la marque dans un film (La boum – 1980). Natalie Rastoin, ayant travaillé avec plusieurs grandes marques, précise la nécessité d’accoler un terme à patrimoine, afin de lui attribuer un sens spécifique. Elle a également insisté sur la recherche d’un patrimoine extérieur à l’entreprise (médias sociaux : Twitter, Facebook etc.) et sur l’intérêt des témoignages des anciens de l’entreprise. Enfin, la Directrice générale d’Ogilvy France a mis en avant l’intérêt du patrimoine et la direction de celui-ci dans le cadre de fusions et de rachats. Le patrimoine est un moyen de rassembler deux entreprises. Dans le cas où elles partagent les mêmes idées cela permet de mettre en avant leurs points communs – le cas de Nestlé et Maggi : une aide à la nourriture – et dans le cas où les entreprises sont différentes, d’accentuer les atouts pour l’avenir.
S’en sont suivies les questions des participants aux intervenants. De nombreux thèmes ont été évoqués. Roger Nougaret a rappelé qu’il fallait confier les services du patrimoine à des professionnels des documents afin qu’ils utilisent des standards (normes archivistiques par exemple), et Marie-Laure Fourt de compléter en précisant l’importance de la structure de l’indexation. A cela, Natalie Rastoin a rajouté une anecdote sur les courriers et leurs intérêts pour l’histoire, d’où l’impératif de conserver les mails au même titre que les écrits. Pour le choix des communications, Arnaud Leblin a précisé les enjeux de la diffusion des documents en décalage avec notre temps, afin que le public voie les changements de mentalité. Un journaliste-documentaliste de Canal + a interrogé les intervenants sur les revenus générés par les archives. Les réponses furent unanimes sur le coût des recherches si un service patrimonial n’existait pas au sein d’une entreprise. En effet, certaines actions comme la communication et la conservation ont un coût au sein de l’entreprise, mais le patrimoine existant est profitable et surtout permet de valoriser la marque, ce qui n’est pas quantifiable en argent.
Des pratiques de valorisation efficaces, créatives et innovantes
L’exposé des cas pratiques a commencé par l’intervention de Laurens d’Albis, le Fondateur-Administrateur du Centre d’Archives de Terre Blanche de PSA Peugeot Citroën. Il a présenté le cadre de création du fonds de dotation Peugeot pour la mémoire, la difficulté à mettre en place un tel service, la recherche des archives qui étaient éparpillées dans les différents services et usines. Laurens d’Albis a explicité les grandes tâches qui incombent à ce Centre, notamment dans la politique culturelle du groupe. Le Centre d’Archives de Terre Blanche possède un excellent matériel de numérisation, aussi bien pour les images que pour les vidéos. Afin d’illustrer les fonds conservés, des extraits thématiques sur la communication de l’entreprise, la communication sur le produit, la formation, le sport automobile, les événements internes ainsi que la mémoire de l’entreprise ont été diffusés.
Le second cas pratique fut présenté par Florence Brachet Champsaur, Responsable du Mécénat et Directrice Patrimoine & archives historiques des Galeries Lafayette et Johanna Zanon, Chef de projet Patrimoine des Galeries Lafayette. Ce service, créé en 2008, regroupe les archives des Galeries Lafayette et du BHV. Une des principales tâches du service est de faire respecter l’esprit originel des Galeries Lafayette, notamment en servant de source pour les conceptions architecturales et les nouvelles créations d’accessoires. La valorisation se fait également via des communications externes, par des visites dans les Galeries, où l’on trouve des panneaux relatifs à l’histoire du lieu, ainsi que des QRcodes à scanner. Une partie de la valorisation se fait aussi grâce à la création d’un compte twitter (depuis mi-mars 2013).
La dernière partie de ce module sur les cas pratiques fût présentée par Clément Malherbe, Chef de projets I.N.A. Expert. Cette intervention portait sur les « Exemples de valorisation de fonds audiovisuels à l’international». L’intervenant a développé son discours autour de quatre thèmes : l’utilisation des réseaux sociaux, l’usage éducatif des archives, les mini-sites évènementiels dédiés aux archives et les dispositifs offlines. En ce qui concerne les médias sociaux, les services patrimoniaux s’en servent pour fidéliser les clients et créer des liens avec eux. C’est notamment le cas du compte Twitter de Coca-cola @Coke_archives. La chaine de magasins Sainsbury a choisi de collaborer avec le musée de Londres afin de partager ses archives sous forme de contenu pédagogique. Les mini-sites évènementiels sont, quant à eux, créés lors d’occasions particulières : anniversaires, besoin de communication autour d’un projet, story telling autour d’un héros de la marque (par exemple l’histoire de la naissance de la marque Adidas). Enfin les dispositifs offlines constituent des rencontres directes avec les passionnés des marques, collectionneurs etc.
Le séminaire a été clôturé par une présentation des différents sites de l’I.N.A. : ina-expert, ina.fr, inamediapro.