L’archivage numérique pérenne, retours d’expérience

Quatre interventions ont abordé la collecte et la conservation des archives numériques lors de ces deux heures. Dans un premier temps, Françoise Banat-Berger et Michel Jacobson sont revenus sur les qualités et limites de la matrice cadastrale numérique qui s’est développée dans les années 1970 et qui en est aujourd’hui à sa 3e édition. La matrice cadastrale numérique est, depuis 2004, produite exclusivement sous forme numérique. Grâce aux financements des collectivités et aux circulaires du SIAF, le bilan de son utilisation est plutôt positif. Elle se fonde sur un travail de redocumentation, de modélisation, de contrôle de qualité et de reformatage des données. Elles font actuellement l’objet d’un changement de format cible (SIARD) et d’une mise au point de procédure de conversion de format.

Lorène Béchard a ensuite pris la parole pour nous présenter l’archivage des Bases de données (BDD). Cette mémoire organisée de l’information tend, de nos jours, à supplanter les fichiers traditionnels. Leur conservation est essentielle mais il faut prendre en compte les problématiques classiques de l’archivage électronique (format, support…) ainsi que la complexité des fichiers traités. La méthodologie proposée par L. Béchard pour l’archivage des BDD insiste sur la nécessité de faire l’inventaire des moyens dont on dispose, tout en définissant les priorités et l’intérêt de chaque BDD à être archivée. Ces questions sont reprises sur le site du CINES : http://www.cines.fr/spip.php?rubrique219

Travaillant aux Archives Départementales de Haute-Garonne, Nathalie Regagnon a évoqué la collecte et la conservation des enregistrements audiovisuels du procès AZF de Toulouse. Ce projet s’est fait dans l’urgence. Le service d’archives, qui n’a pas de SAE, a effectivement dû préparer le cahier des charges en seulement deux semaines pour adopter la stratégie la plus pérenne possible. Sur les conseils du SIAF et de la mission archives du ministère de la Justice, le cahier des charges a défini les conditions de tournage et surtout de sécurité à mettre en place autour d’archives si sensibles. Les livrables, composés des enregistrements dans leur intégralité, des métadonnées et procès-verbaux de remise, faisant office de bordereaux de versement, exigeaient également qu’aucune copie ne soit conservée par la société de tournage. Pour assurer une conservation pérenne, un exemplaire de conservation sous format MPEG2 et des modalités de transfert ont été mis en place. En revanche, le format Windows employé pour l’exemplaire de consultation n’est ni interopérable ni pérenne. Toutefois, l’élaboration d’un plan de classement, la conformité avec la norme ISAD(G) et l’import des instruments de recherche dans Thot permettent une communication optimale, sans élucider cependant les confusions autour des délais de communication. Les AD31 sont désormais concentrées sur les versements des archives papiers et autres supports concernant le procès.

Enfin, la collecte des documents numériques non structurés auprès des cabinets ministériels, abordée par Éléonore Alquier et Marie-Élodie Benoit, présente de nouvelles problématiques centrées autour du contexte de production des documents (très hétérogène en fonction des supports et outils, éclatement physique des données, pas de stabilité des fichiers), de la nature des dossiers où sont mêlés données publiques et données personnelles, notamment dans les messageries électroniques, et de l’organisation des cabinets ministériels en eux-mêmes, rendant confuse la notion de producteur. Les périmètres du fonds sont donc difficiles à cerner. Or, cette collecte est nécessaire pour compléter les fonds papier et se veut parfois une collecte de substitution. Elle se fait dans le cadre juridique et selon le protocole de la collecte des archives papier, hormis pour les messageries personnelles pour lesquelles est signée une lettre attestant de leur caractère professionnel et du volontariat de la remise des données. Le bilan est mitigé : les données versées sont parfois inexploitables. Il convient d’établir une relation de confiance avec le ministère et ses membres, et de bien définir les rôles des acteurs de la collecte, en donnant à l’informaticien une place centrale.

Stéphanie Desvaux