Depuis l’origine, l’histoire du Musée national de Céramique est intimement liée à celle du développement de la Manufacture nationale de porcelaine de Sèvres. Le Musée est une émanation directe de la Manufacture, sa vocation et son ambition en sont dans une large mesure tributaires. Bien qu’elles aient connues des relations troubles, ces deux institutions sont aujourd’hui unies au sein de la Cité de la Céramique de Sèvres.
Sommaire
L’histoire commune de la Manufacture et du Musée
La Manufacture nationale de Sèvres prend son origine dans la fondation en 1740 d’un atelier de porcelaine à Vincennes, dans une tour du château. A l’initiative du projet se trouve Orry de Fulvy, Intendant des Finances et administrateur de la Compagnie des Indes, et quelques ouvriers transfuges de la Manufacture de Chantilly. Sous l’influence de Madame de Pompadour, la petite entreprise est transférée à Sèvres, sur la route de Paris à Versailles. Elle fait alors appel à des artistes reconnus de son temps pour fournir des modèles, tels Jean Claude Duplessis, François Boucher ou Étienne Maurice Falconet, puis notamment Louis Boizot et Jean Jacques Lagrenée le Jeune. En 1756, la Manufacture s’installe à Sèvres dans des bâtiments construits spécialement pour elle, puis, en 1759, le roi la fait passer sous l’entier contrôle de la Couronne. En 1768, la découverte d’un gisement de kaolin à Saint-Yrieix-la-Perche (près de Limoges) permet à la Manufacture de créer une nouvelle pâte et d’ainsi développer la production de ses ateliers dès 1770.
En 1800, l’arrivée d’Alexandre Brongniart (1770-1847) comme administrateur de la Manufacture va donner une nouvelle impulsion à la production. Sa curiosité pour le matériau, l’intense activité expérimentale et la constante recherche d’excellence lui suggèrent la création en 1802 du Musée céramique et vitrique qui s’ouvre au public en 1824. Il s’agit du premier musée exclusivement consacré à la céramique et aux arts du feu, à vocation à la fois pédagogique et technique. Il est situé au dernier étage de la Manufacture et présente sa production, mais également les collections rassemblées par Alexandre Brongniart. En 1819, Brongniart s’adjoint les services de Désiré Riocreux, peintre de la Manufacture qui devient le premier conservateur du Musée national de céramique. Les deux hommes travaillent en étroite collaboration et publient en 1845 le premier catalogue du Musée intitulé Description méthodologique du Musée Céramique de la Manufacture royale de porcelaine. Jusqu’en 1933, le Musée constitue un service à part entière de la Manufacture, il est dirigé par un conservateur chargé de l’ensemble des collections réunies. En 1845, Brongniart résumait dans sa Description Méthodique, ses objectifs qui n’ont que peu évolué depuis : « réunir en un même lieu pour la connaissance et la délectation du plus grand nombre des céramiques et des verres de toutes les sortes, de tous les lieux, de toutes les périodes. »
La Manufacture et le Musée sont transférés en 1876 mais restent à Sèvres, dans des bâtiments construits spécialement par l’État, sur un terrain de quatre hectares détaché du parc de Saint-Cloud (qu’ils occupent encore aujourd’hui). L’activité ne cesse de se développer et la Manufacture participe aux grandes expositions universelles et internationales. Le Musée n’est pas en reste puisqu’il accueille ses premières expositions de céramiques contemporaines à partir de décembre 1920. Cette année là, Georges Lechevallier-Chevignard, directeur de la Manufacture de 1920 à 1938, aménage le salon d’honneur du Musée national de céramique afin d’accueillir la cérémonie protocolaire de signature du traité de Sèvres. La nouvelle organisation du salon d’honneur lui donne alors l’idée d’organiser une série d’exposition d’art contemporain entre 1920 et 1921. Georges Lechevallier-Chevignard obtient en 1927 l’autonomie financière pour la Manufacture, tandis que le Musée est rattaché à la conservation du musée du Louvre en 1934. A partir de cette date, les rapports avec la Manufacture s’amenuisent (jusqu’à la création en 2009 de l’établissement public « Sèvres, Cité de la Céramique »).
La seconde guerre mondiale frappe durement l’activité du Musée et de la Manufacture. En 1942, le Musée est touchée par les bombardements alliées et ferme ses portes au public jusqu’en 1948. La restauration du bâtiment est achevée sous la direction d’Henri Pierre Fourest, qui œuvre également à redynamiser l’activité de l’établissement. Il change l’aménagement des salles d’expositions dans les années 1960 et ouvre huit nouvelles salles en 1979. Il organise de nombreuses expositions d’art contemporain et contribue également à la publication de la revue des Cahiers de la Céramique. Il est remplacé en 1981 par Antoinette Hallé. Elle continue le travail d’expositions contemporaines et met en place des partenariats avec de nombreux musées à l’étranger, notamment au Japon. Au début des années 2000, les réserves du Musée sont entièrement réaménagées afin d’accueillir un plus grand nombre d’œuvres.
En décembre 2009, le décret 2009-1643 crée l’établissement public Sèvres – Cité de la Céramique. Cette nouvelle entité est le fruit de la fusion du Musée national de céramique et de la Manufacture nationale de Sèvres. David Caméo, directeur de la Manufacture de 2003 à 2009, est nommé directeur de la Cité. En 2012, le décret 2012-462 rattache le musée Adrien Dubouché de Limoges à la Cité de la Céramique. L’établissement public continue les politiques menées par la Manufacture et le Musée relatives à la diffusion de l’art contemporain.
La gestion des archives du Musée national de céramique
Depuis décembre 2009, le Service des collections documentaires est en charge de la gestion des archives au sein de la Cité de la Céramique. Avant de présenter ce service, il est nécessaire de présenter au préalable les services d’archives qui existaient au sein du Musée national de céramique et de la Manufacture nationale de Sèvres.
Les archives du Musée et de la Manufacture sont complémentaires, néanmoins l’évolution de la conservation des archives diffère grandement selon les institutions :
Archives de la Manufacture.
Les premiers classements et inventaires sont entrepris à partir de 1814 sous la direction d’Alexandre Brongniart (à la fois pour les objets céramiques que pour le patrimoine écrit). Ils concernent en grande partie l’activité de la Manufacture. En 1876 le transfert de la Manufacture et du Musée sur le site actuel entraîne une dispersion des archives. Elles deviennent difficilement accessibles et incommunicables. En 1903, Émile Bourgeois entreprend le plan de classement des archives de la Manufacture. Il les fait regrouper au sein d’une « bibliothèque », les rendant ainsi plus accessibles. La séparation du Musée et de la Manufacture en 1934 provoque un profond changement dans la prise en charge des archives. Au sein de la Manufacture, la « bibliothèque » est le lieu désigné pour recevoir les archives, les ouvrages de bibliothèque, la documentation et les collections (pièces blanches, modèles en plâtres, moules et arts graphiques). Dès 1910, on crée un poste de secrétaire de l’administration de la Manufacture, qui est également archiviste et bibliothécaire. Après 1934, les fonds stockées au sein de la bibliothèque de la Manufacture ne concernent plus que les archives de l’institution. La même année, la Manufacture reverse au Musée les archives qu’elles possèdent sur l’activité et l’histoire du Musée et également les documents relatifs aux informations sur la production des manufactures françaises et étrangères entre 1668 et 1923.
Archives du Musée national de céramique.
Très peu d’informations nous sont parvenues sur le traitement des archives au sein du Musée après 1934. Le nombre d’employés étant assez faible (entre huit et dix personnes au maximum sans compter le personnel de sécurité et de surveillance), les archives sont gérées directement par les conservateurs . Cependant la priorité est mise sur la gestion des collections. Les archives servent ponctuellement lors des recherches d’informations sur l’histoire du Musée et des collections. Néanmoins, elles ne sont pas complètement laissées à l’abandon. Entre 1945 et 2009, des chargés de mission sont sollicités temporairement pour trier et classer les archives. Ces personnes n’étant pas des archivistes de profession, elles effectuent le plus souvent des tris documentaires valorisant les collections du Musée au dépend de l’intégrité des archives. Ainsi, de nombreux documents sont mélangés voire même égarés. Dans les années 2000, des chargés d’études documentaires sont employés directement pour gérer la bibliothèque du Musée et plus largement les archives.
Les archives du Musée national de céramique sont d’une très grande richesse. Bien que l’institution n’existe que depuis 1802, ses archives s’étendent de 1668 à 2009. Le fonds regroupe une grande variété de documents concernant la gestion administrative du Musée et l’accroissement des collections. Les archives administratives du Musée sont principalement constituées des archives des conservateurs, mais également de celles du secrétariat général, des services de valorisation du Musée (photographique, restauration et visites) et des documents ayant trait aux relations du Musée avec l’administration générales et les associations. Les archives relatives à la gestion des collections regroupent des documents ayant trait à la recherche d’informations sur les collections, aux acquisitions, aux expositions, aux œuvres déplacées pendant la guerre, aux avis scientifiques pour le passage en douane, à la muséographie du Musée et à son mobilier. Ces archives sont donc une source d’informations pour les conservateurs et les experts, mais également pour les chercheurs et les amateurs.
La Cité de la Céramique et le service des collections documentaires.
Avec la création du nouvel établissement en décembre 2009, les domaines d’activités ont été réorganisés. Les archives sont prises en charge par le service des collections documentaires1. Celui-ci est situé à l’ancien emplacement du service des archives de la Manufacture. Depuis 2010, le service des collections documentaires œuvre au rapatriement des archives du Musée vers ses locaux. En outre il s’occupe de l’harmonisation de la gestion des archives de la Cité. Le traitement des archives du Musée a été effectué d’avril à juillet 2013, afin de les rendre accessibles aux chercheurs dès septembre 2013. Parallèlement à ses activités de gestion, le service des collections documentaires participe actuellement au développement du réseau « Archives en Musée », qui a pour objectif de former et sensibiliser les personnels en charge des archives dans les musées. La Cité y est représentée par le service des collections documentaires, en tant que membre du bureau. Le service participe aux réunions et aux décisions du groupe.
Par ailleurs, il est à noter qu’en tant qu’établissement public, la Cité de la céramique devrait verser ses archives définitives aux Archives Nationales. Cependant, à l’instar du château de Versailles, la Cité souhaite gérer ses archives par elle-même, et tente actuellement de mettre en place une convention d’autonomie qui lui permettrait de conserver ses fonds. Pour pouvoir garder ses archives, l’établissement public doit prouver qu’il dispose d’un personnel qualifié pour la prise en charge des archives, de locaux pouvant accueillir des fonds d’archives, d’une salle de lecture pour la consultation des documents et bien entendu d’un service dédié à la gestion des archives. En attendant que la convention d’autonomie soit mise en place, le service des collections documentaires conserve ses archives précieusement.
(Pour d’autres renseignements sur le service des collections documentaires et la Cité de la céramique de Sèvres, veuillez consulter le site http://www.sevresciteceramique.fr/)
1 Cette gestion s’opère dans le cadre de sa mission de gestion des ressources documentaires du Musée et de la Manufacture.
Commentaire sur “Les Archives du Musée national de céramique”
Super interessant Gerald. Bravo ! Je vais m’en inspirer pour les oraux 😉